Comment créer une formation digitale efficace ?

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Pour créer des formations digitales efficaces, il faut avant tout se poser les bonnes questions

Une formation efficace est une formation à l’issue de laquelle les apprenants sont capables de mobiliser les savoirs acquis en situation réelle, et ce durablement. La formation, et plus généralement l’apprentissage, implique un changement d’état : son objectif est de rendre les apprenants capables de faire quelque chose qu’ils n’étaient pas capables de faire avant la formation. C’est ce qui distingue la formation de l’information, qui porte un objet à votre connaissance mais n’a pas nécessairement d’impact de long terme sur votre conception du monde ou sur vos comportements.

La clé d’une formation efficace, qu’elle ait lieu en ligne et/ou en présentiel, est de renverser le raisonnement consistant à partir des moyens ou des possibilités technologiques. Vous devez vous demander « pourquoi » dans un premier temps, et « comment » seulement dans un second temps. La question clé n’est pas : où va-t-on caser le workshop ? Mais bien : quelle compétence veut-on faire acquérir et comment vérifier que ces compétences sont bien acquises ? 

Recentrer votre formation sur les résultats d’apprentissage

Des contenus aux objectifs de résultat

Concevoir une formation efficace implique donc de repenser votre formation en passant d’une approche centrée sur les contenus (ce que je veux transmettre) à une approche centrée sur les résultats d’apprentissage (ce que l’apprenant doit être capable de faire). Trop souvent, les moyens (un vade mecum, un serious game…) prennent le pas sur la fin et vous empêchent de vous poser les bonnes questions (voir notre article sur la place de l'engagement dans l'apprentissage).

Plutôt que de produire une ressource et de vous demander ensuite comment l’intégrer à une formation, il est préférable de vous demander d’abord : qu’est-ce que je veux rendre mes apprenants capables de faire ? Cette question peut prendre des formes différentes selon le type de contenus : quelles situations doit-il être capable d’analyser, de comprendre, de gérer ? Quels problèmes doit-il être capable de résoudre ? Listez l’ensemble de ces notions et de ces compétences, sans chercher nécessairement à les regrouper par catégorie dans un premier temps.

Granulariser vos objectifs de résultat

Vous pouvez ensuite passer à la granularisation de vos objectifs. Il s’agit de les regrouper en des notions ou compétences clés, que vos apprenants pourront travailler séparément. L’enjeu est de définir le niveau de regroupement – ou de « granularité » - pertinent : un grain doit regrouper suffisamment peu de notions pour être abordable (un contenu trop complexe peut créer une charge cognitive trop importante pour maintenir l’attention de l’apprenant), mais suffisamment pour impliquer un changement d’état significatif.

Trouver les épreuves pertinentes pour chaque objectif de résultat

Dès lors que chaque résultat d’apprentissage est défini comme une nouvelle capacité développée chez l’apprenant, il doit être possible de concevoir une épreuve (quelle que soit sa forme : un exercice, un jeu, un projet…) qui permet de vérifier si celui-ci a été assimilé, ou non. Cela vaut que l’on parle d’ingénierie aéronautique ou de cuisine, de philosophie ou de mathématiques, de savoir-faire ou de savoir-être.

Pour chaque notion ou compétence clé, essayez de trouver des questions qui répondent aux deux critères suivants :

  • Toute personne qui maîtrise cette notion ou compétence répondra correctement à cette question.
  • Aucune personne qui ne maîtrise pas cette notion ou compétence ne répondra correctement à cette question (sauf par hasard).

Identifier les erreurs plausibles

Afin de vous aider dans cet exercice, demandez-vous, pour chaque question que vous avez identifiée :

  • Quelles erreurs voulez-vous éviter que vos apprenants commettent ?
  • Quels problèmes ou difficultés vont-ils fréquemment rencontrer ?

Cela vous permet de vérifier que vous êtes bien en train de tester une notion ou compétence clé (voir notre article sur la conception d'évaluation). En effet, si vous ne voyez pas quelle erreur les apprenants pourraient réellement faire sur cette question, c’est qu’ils n’ont rien à apprendre. Vous êtes donc dans une logique d’information plutôt que de formation.

Attention : dans le cas d’un QCM, les erreurs doivent être plausibles. Il est fréquent de voir des formations proposer des questions à correction automatique caricaturales, où la mauvaise réponse est évidente. Par définition, vos apprenants n’ont pas besoin de savoir qu’ils ne doivent pas faire ce qu’il ne leur viendrait jamais à l’idée de faire ! Il faut plutôt partir du réel : n’hésitez d’ailleurs pas à demander à des apprenants ce qu’ils répondraient spontanément à votre question.

Créer une gormation numérique digitale efficace

Choisissez les modalités de formation

Vous avez granularisé vos objectifs de résultat et conçu les épreuves permettant de mesurer s’ils ont été atteint. Vous pouvez commencer à penser le parcours pédagogique d’ensemble : dans quel ordre aborder chaque grain et avec quelles modalités d’apprentissage ?

Rappelons quatre enseignements essentiels des sciences cognitives pour choisir vos modalités d’apprentissage :

1/ la lecture passive de documents ou le visionnage de vidéos donne souvent l’illusion de la maîtrise, tout en n’ayant que peu d’incidence sur votre capacité à mobiliser les savoirs et compétences en situation sur le long terme.

2/ Pour maîtriser durablement les savoirs et les compétences, l’apprenant doit les mobiliser activement durant l’apprentissage à travers des exercices pertinents. Vous pouvez vous servir des épreuves que vous avez définies pour chaque objectif. Certaines compétences se prêteront davantage à un apprentissage par projets collectifs, d’autres à des exercices individuels.

3/ Ces exercices doivent être espacés dans le temps : le travail de récupération en mémoire permet de consolider les acquis sur le long terme.

4/ Ces exercices doivent également être variés et alterner les thématiques : les expériences démontrent que mélanger des tests sur différentes thématiques produit de meilleurs résultats que de travailler les thématiques les unes après les autres. Les bénéfices de cette approche, bien que non ressentis immédiatement, sont à la fois tangibles et pérennes, avec des taux de réussite jusqu’à trois fois supérieurs.

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À propos de l'auteur

Philip Moore

Philip est le directeur Produit de Didask. Très impliqué dans les problématiques d’efficacité pédagogique, il a co-conçu la méthodologie agile Didask. Diplômé de Sciences Po Paris et de la London School of Economics, Philip est aussi l’auteur de “Tous Pédagogues” coécrit avec Svetlana Meyer, paru aux éditions Foucher.

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